Les compléments alimentaires ont rarement les faveurs du corps médical. Certains rhumatologues reconnaissent toutefois leur intérêt pour limiter la prescription de médicaments anti-inflammatoires.
Les maladies inflammatoires des articulations ont en commun d’être douloureuses, voire invalidantes. La plus connue est l’arthrose, qui se traduit par une destruction progressive des cartilages. Elle est aussi la plus répandue puisqu’elle concerne un peu plus de 10 millions de Français.
« La prise en charge de l’arthrose repose sur un traitement symptomatique, explique le Pr Thierry Schaeverbeke, chef du service de rhumatologie au CHU de Bordeaux. Mais les anti-inflammatoires entraînent fréquemment des troubles digestifs, en particulier des douleurs de l’estomac. A la longue, ils peuvent être toxiques pour les reins, augmenter la pression artérielle et, par conséquent, le risque cardio-vasculaire. »
De l’intérêt des compléments à base de polyphénols ?
Or, que constate le Pr Schaeverbeke ? « Que nos patients qui prennent des compléments alimentaires destinés à soulager les articulations ont moins recours aux médicaments anti-inflammatoires. » Parmi les nutriments à fort potentiel, les polyphénols extraits des végétaux occupent une place de choix. Les anthocyanes, présents dans les fruits à peau rouge, seraient particulièrement intéressants. Ainsi, les auteurs d’une étude publiée dans le British Journal of Sports Medicine ont observé que la consommation de jus de cerises griottes permettait de réduire la douleur occasionnée chez des sportifs par un exercice excentrique (contraction d’un muscle étiré).
De leur côté, des chercheurs de l’Université de Bordeaux viennent de mettre au point un complément alimentaire aux vertus anti-inflammatoires à base de malvidine, l’anthocyane qui donne sa couleur au raisin noir, et d’extrait de propolis, un produit de la ruche. « Ce produit s’est révélé au moins aussi efficace que la cortisone sur des rats souffrant d’arthrite ». Prochaine étape : une étude clinique chez l’homme afin de confirmer, ou non, ces observations.
Quid des autres ?
D’autres extraits végétaux à base de lipides spécifiques du soja et de l’avocat se retrouvent dans certains compléments alimentaires ainsi que dans des médicaments classés parmi les anti-arthrosiques d’action lente (1). « Ces composés présentent un intérêt, certes modeste, pour réduire la douleur et améliorer la mobilité articulaire, surtout dans les arthroses débutantes, explique le Pr Schaeverbeke. Il faut en faire des cures régulières d’au moins trois mois. » Même observation en ce qui concerne la chondroïtine sulfate et la glucosamine.
Enfin, si certaines plantes comme le cassis, l’harpagophytum, l’ortie ou la prêle sont traditionnellement recommandées en cas de douleurs articulaires, aucune étude n’a jamais prouvé leur bénéfice dans le traitement des rhumatismes. Mais elles peuvent soulager une douleur liée à un traumatisme.
Conclusion ? « Nous n’avons pas l’habitude de prescrire des compléments alimentaires, car même si leur réglementation a évolué, leur mise sur le marché n’est pas assujettie à des études cliniques. Toutefois, à la demande des patients, nous pouvons en conseiller quelques-uns dans le but de réduire la consommation des médicaments anti-inflammatoires », admet le Pr Schaeverbeke.
(1) Ces médicaments ne sont plus remboursés depuis quelques mois.
Fruit de ses recherches en immunologie, le Dr Jean Seignalet (1936-2003) met au point en 1983 un régime dit « hypotoxique » qui soulage de nombreux patients. Sans pour autant emporter l’adhésion du corps médical qui émet de sérieuses réserves. Depuis peu, certains médecins s’y intéressent de nouveau, relançant la polémique. Parmi eux, le Dr Jean-Pierre Poinsignon, rhumatologue à Grenoble. Entretien.
Comment le Dr Seignalet a-t-il mis au point son régime ?
J-P. P. – Il est parti du constat que la médecine traditionnelle ne permettait pas toujours de traiter efficacement de nombreuses pathologies. Il s’est alors intéressé à la nutrithérapie. Selon ses travaux, la consommation au long cours de certains aliments favoriserait le développement de maladies inflammatoires chroniques chez les personnes génétiquement prédisposées.
Quels en sont les grands principes ?
J-P. P. – Il s’agit d’éliminer certaines sources de protéines qui peuvent entraîner une intolérance. Cela concerne tous les aliments dérivés des laits de vache, brebis ou chèvre, beurre et crème compris, ainsi que certaines céréales, notamment celles qui contiennent du gluten, comme le blé, l’épeautre, le seigle ou encore l’orge. Il faut également éviter les cuissons à forte température (grillade, barbecue, friture, rôti au four) susceptibles d’entraîner la formation de composés toxiques, ainsi que les aliments industriels afin de ne pas ingérer d’additifs chimiques.
Quels sont les aliments conseillés ?
J-P. P. – Les fruits et légumes, crus ou cuits vapeur pour conserver leurs vitamines, et bio si possible, les fruits et légumes secs, le riz, le sarrasin, le quinoa et le tapioca, les poissons et les viandes. Seules les huiles d’olive, de noix ou de colza, exclusivement vierges, sont recommandées. Enfin, une supplémentation en oligo-éléments et probiotiques (ferments) est conseillée.
Ce régime n’induit-il pas de carence ?
J-P. P. –Toutes les céréales ayant globalement les mêmes apports nutritionnels, le remplacement des céréales contenant du gluten (blé, avoine…) par des céréales sans gluten (riz, sarrasin…) ne modifie en rien l’équilibre des repas. La suppression des produits laitiers doit être compensée par d’autres sources de calcium : eaux en bouteilles enrichies, fruits et légumes frais, fruits secs (amande, figue, noisette), certains poissons et fruits de mer comme la sardine ou le bigorneau. Les céréales complètes sont plus riches en calcium que les céréales raffinées. Enfin, le sésame peut être utilisé pour agrémenter les plats.
Pourquoi avoir proposé ce régime à vos patients ?
J-P. P. – Dans les cas d’arthrose, tendinite ou de rhumatismes, les médicaments dont nous disposons aujourd’hui ne soulagent pas toujours suffisamment. C’est l’une de mes patientes, guérie par la diététique ancestrale du Dr Seignalet, qui m’a amené à s’intéresser à son travail. Je n’ai pas abandonné la médecine, mais j’explique à mes patients que les choix alimentaires ne sont pas anodins pour la santé.
N’est-ce pas difficile de suivre cette diététique à vie ?
J-P. P. – Il n’est jamais évident de modifier ses habitudes alimentaires. Toutefois, pour ceux de mes patients qui ont pu constater une amélioration au bout de quelques mois de régime, la motivation est au rendez-vous ! Surtout si les entorses à ce régime réactivent les douleurs.
En savoir plus : Rhumatismes. Et si votre alimentation était coupable ?, Jean-Pierre Poinsignon, éd. François-Xavier de Guibert (2009).
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